vineri, 5 februarie 2016

TOP 5 films d'animation japonaise

Les films d'animation ne sont pas la chasse gardée des studios occidentaux bien connus comme Disney, Pixar ou Dreamworks. Des merveilles d'animation nous viennent du Japon et les noms des plus célèbres réalisateurs japonais commencent à s'inscrire dans l'imaginaire collectif : Hayao Miyazaki, Katsuhiro Ôtomo ou Satoshi Kon pour n'en citer que quelques-uns.
Ce top 5 comprend également ce que l'on qualifie plus traditionnellement des "dessins animés", dont la création ne nécessite pas l'utilisation de techniques 3D.



1. LE TOMBEAU DES LUCIOLES

SYNOPSIS ET DÉTAILS

Japon, été 1945. Après le bombardement de Kobé, Seita, un adolescent de quatorze ans et sa petite soeur de quatre ans, Setsuko, orphelins, vont s'installer chez leur tante à quelques dizaines de kilomètres de chez eux. Celle-ci leur fait comprendre qu'ils sont une gêne pour la famille et doivent mériter leur riz quotidien. Seita décide de partir avec sa petite soeur. Ils se réfugient dans un bunker désaffecté en pleine campagne et vivent des jours heureux illuminés par la présence de milliers de lucioles. Mais bientôt la nourriture commence cruellement à manquer.

2.LE VOYAGE DE CHIHIRO

SYNOPSIS ET DÉTAILS

Chihiro, dix ans, a tout d'une petite fille capricieuse. Elle s'apprête à emménager avec ses parents dans une nouvelle demeure.
Sur la route, la petite famille se retrouve face à un immense bâtiment rouge au centre duquel s'ouvre un long tunnel. De l'autre côté du passage se dresse une ville fantôme. Les parents découvrent dans un restaurant désert de nombreux mets succulents et ne tardent pas à se jeter dessus. Ils se retrouvent alors transformés en cochons.
Prise de panique, Chihiro s'enfuit et se dématérialise progressivement. L'énigmatique Haku se charge de lui expliquer le fonctionnement de l'univers dans lequel elle vient de pénétrer. Pour sauver ses parents, la fillette va devoir faire face à la terrible sorcière Yubaba, qui arbore les traits d'une harpie méphistophélique

3. PRINCESSE MONONOKÉ
SYNOPSIS ET DÉTAILS
Au XVe siècle, durant l'ère Muromachi, la forêt japonaise, jadis protégée par des animaux géants, se dépeuple à cause de l'homme. Un sanglier transformé en démon dévastateur en sort et attaque le village d'Ashitaka, futur chef du clan Emishi. Touché par le sanglier qu'il a tué, celui-ci est forcé de partir à la recherche du dieu Cerf pour lever la malédiction qui lui gangrène le bras.

4.LE CHÂTEAU AMBULANT

SYNOPSIS ET DÉTAILS

La jeune Sophie, âgée de 18 ans, travaille sans relâche dans la boutique de chapelier que tenait son père avant de mourir. Lors de l'une de ses rares sorties en ville, elle fait la connaissance de Hauru le Magicien. Celui-ci est extrêmement séduisant, mais n'a pas beaucoup de caractère... Se méprenant sur leur relation, une sorcière jette un épouvantable sort sur Sophie et la transforme en vieille femme de 90 ans.
Accablée, Sophie s'enfuit et erre dans les terres désolées. Par hasard, elle pénètre dans le Château Ambulant de Hauru et, cachant sa véritable identité, s'y fait engager comme femme de ménage. Cette " vieille dame " aussi mystérieuse que dynamique va bientôt redonner une nouvelle vie à l'ancienne demeure. Plus énergique que jamais, Sophie accomplit des miracles. Quel fabuleux destin l'attend ? Et si son histoire avec Hauru n'en était qu'à son véritable commencement ?

5. MON VOISIN TOTORO

SYNOPSIS ET DÉTAILS


Deux petites filles viennent s'installer avec leur père dans une grande maison à la campagne afin de se rapprocher de l'hôpital ou séjourne leur mère. Elles vont découvrir l'existence de créatures merveilleuses, mais très discrètes, les totoros.
Le totoro est une créature rare et fascinante, un esprit de la forêt. Il se nourrit de glands et de noix. Il dort le jour, mais les nuits de pleine lune, il aime jouer avec des ocarinas magiques. Il peut voler et est invisible aux yeux des humains. Il existe trois totoros : O totoro (gros), chu totoro (moyen) et chili totoro (petit).

Source: 1. http://www.allocine.fr/
            2. https://www.youtube.com/

Où en est l'animation française ?

L’animation française est un secteur paradoxal : quelques fleurons, reconnus pour leurs qualités artistiques et plébiscités par le public, polarisent un secteur essentiellement tenu par la télévision et ne parvenant pas vraiment à se mettre au niveau de la puissance économiques des films américains.

Un rapport du CNC publié en 2012 analyse le secteur à la loupe : 355  heures de programmes audiovisuels d’animation produits dans l’année, à un coût moyen de 593 250 € de l’heure. L’animation représente 10 % de la production audiovisuelle française (en heures produites)

L’animation représente 10 % de la production audiovisuelle française en heures produites.
, mais compte pour 33 % de ses exportations ! Les films d’animation représentent 2,6 % des films français produits entre 1998 et 2008 (2,9 % en moyenne entre 2008 et 2011), pour environ 5 % des investissements. Plus chers à produire, les films d’animation (toutes nationalités confondues) font aussi l’objet de plus de promotion publicitaire lors de leur sortie en salle, sont montrés dans plus de salles et restent en moyenne plus longtemps à l’affiche. Ces chiffres cachent de grandes disparités : un film d’animation français réalise en moyenne 509  000 entrées (254 000 entrées en 2008), alors qu’un film américain en génère 2 millions (2,1 millions en 2008)... À la télévision, les chaînes historiques diffusent un peu moins de 4 000 heures de programmes animés (3 849 heures en 2011), soit 7,3 % en 2011 de leur grille. France 5, France 3 et TF1 sont les principaux diffuseurs, en majorité le matin ; les productions françaises dominent (40,8 %), suivie des américaines (30,6 %) ; étrangement, les productions japonaises (comme celles deToei Animation) sont très minoritaires (la catégorie des autres nationalités, principalement des productions japonaises, australiennes et canadienne représente  17,8 %). Enfin, la distribution vidéo des longs métrages d’animation représente 17,4 % des ventes totales (81,7 % du CA est effectué par les films américains – produits par exemple par Disney ou DreamWorks).

Mettons un peu de chair sur ces chiffres : parmi les têtes d’affiche du cinéma d’animation français, on reconnait les films produits par la société les Armateurs (la série KirikouLes Triplettes de Belleville,Ernest et Célestine...), les films d’Europacorp (la série Arthur et les Minimoys), de Futurikon (Chasseurs de DragonMinuscule), de Xilam (KaenaTous à L’Ouest), et quelques créations de petits producteurs (RenaissancePersépolisAstérix et les Vikings...) ; en termes économiques, les films les plus chers sont ceux de la série Arthur (plus de 60 millions € par film). Mais la série d’Europacorp est l’illustration que changer d’échelle est bien délicat.

Au-delà des chiffres et des noms, il faut comprendre le secteur en fonction d’un autre écosystème riche, celui de la bande dessinée franco-belge, et y voir l’influence croissance de deux autres écosystèmes en pleine croissance : les effets spéciaux et les jeux vidéo.

Un secteur structuré par la télévision et la bande dessinée

L’animation française, en tant que secteur comme en tant qu’art, est fermement ancrée sur deux piliers robustes : la télévision d’une part, la bande dessinée d’autre part.

Financièrement, les chaînes de télévision tirent le secteur. En 2008, France Television achetait 23,8 millions € (soit 153 heures) de programmes d’animation à destination de la jeunesse (répartis ainsi : 1,9 million € pour France 2, 18,2 millions € pour France 3, et 3,7 millions € pour France 5), et TF1 7, 8 millions € (46 heures). Des chaînes spécialisées fleurissent sur la TNT (Gulli, Boomerang), le câble et le satellite (Cartoon Network, Disney Channel...). Beaucoup de programmes sont importés sur les chaînes privées, mais les chaînes publiques achètent principalement des séries françaises. Récemment, des programmes courts à destination d’un public adulte sont commandés par des chaînes généralistes : Silex and the City, par exemple, programmée par Arte.



Plusieurs acteurs se partagent le marché, parmi lesquels le groupe Moonscoop, le groupe Media-Participations et Xilam, trois entreprises aux profils et parcours bien distincts.

Ces studios ont en commun une activité d’exploitation de licences issues du monde de la bande dessinée. Moonscoop exploite la license Titeuf. Les studios Ellipsanime Productions, Dargaud Media et Dupuis Audiovisuel, tous trois intégrés au groupe Media-Participations, travaillent respectivement sur Les Aventures de Tintin, Babar, Corto Maltese et Léonard (Ellipsanime), Boule et Bill, Valérian et Laureline et Garfield & Cie (Dargaud Media), et Spirou, Flash GordonJojoCédricPapyrus et Kid Paddle (Dupuis Audiovisuel). Enfin, Xilam produit les séries Lucky LukeLes Daltons, et Rantanplantirées des personnages de l’œuvre de Morris. Les trois studios n’ont cependant pas le même rapport aux licences : pour Moonscoop et Xilam, les séries ont nécessité la négociation et le rachat des droits ; dans le cas de Media-Participation, les productions bénéficient de synergies existantes avec les éditeurs du groupe (Dargaud, Lucky Comics, Le Lombard, Dupuis...) pour lesquels les séries constituent une forme de diversification des revenus.

Au croisement des industries de la bande dessinée et de l’animation, Angoulême apparait rapidement comme un lieu incontournable. Pour son Festival international de bande dessinée d’une part, mais aussi pour son pôle de création audiovisuel spécialisé dans les métiers de l’image animée, Magelis, qui concentre les studios de Moonscoop, Dargaud Média, ou encore Normaal Animation (les studios à l’origine de la série Avez-vous déjà vu, diffusée sur Canal +), ainsi que plusieurs écoles d’animation.

Les studios français produisent aussi de nombreuses licences originales. Xilam a été rendu célèbre par ses fameux Zinzins de l’espace, créés en 1995, suivis d’Oggy et les Cafards (1997), Ratz (2001),Zig et Sharko (2010) etc... Moonscoop a créé la série Code Lyoko, qui a connu un succès international, Millimage la série Lascars, par la suite adaptée au cinéma.

D’autres studios français produisent des séries animées : Gaumont Animation (ancien Alphanim) est célèbre pour sa série Franklin la torture ; Blue Spirit Animation, récemment mise à l’honneur par son remake de la série Les Mystérieuses Cités d’or ; Marathon, filiale de Zodiak Entertainment, avecRekkit ou Le Marsupilami ; ou encore CyberGroup Studio, avec Zou, et Nina Pedalpo...

Mais le métier change, et entre dans une escalade technologique (et financière). La plupart des studios produisent désormais des séries animées en 3 dimensions : GarfieldLe Manège Enchanté,Le Petit Prince..

Le fragile passage au grand écran

Comment les créateurs passent-ils du petit au grand écran ? Le cinéma d’animation français est-il assis seulement sur l’activité télévisuelle, ou trouve-t-il de nouvelles sources de financement et d’inspiration ?

Un certain nombre de studios d’animation commencent donc par la série animée avant de produire des longs métrages de cinéma. Xilam par exemple, pourtant une ancienne branche de Gaumont, ne lance une création longue originale qu’en 2001 avec Kaena, la prophétie (qui ne rencontre pas le succès escompté), puis avec Lucky Luke, Tous à l’Ouest, et Oggy et les Cafards en 2013. Marathon Media convertit sa série Totally Spies en long métrage, tandis que Blue Spirit produit un film original,Le Tableau. Il y a donc 3 grands types de films d’animation : adaptation d’une livre ou d’une bande dessinée ; adaptation d’une série télévisée ; création originale. Cette dernière catégorie est sans nul doute la plus risquée, et s’appuie d’avantage sur le talent et le nom d’un créateur que sur celui de sa licence.
 
 
Reportage France 3 sur la sortie de Tous à l'Ouest

Quelques rares réalisateurs passent tout de suite au long métrage : Michel Ocelot, qui commence avec plusieurs cours métrage avant de rencontrer son premier succès public et critique en 1998 avecKirikou et la Sorcière (au terme de son exploitation en France, le film a cumulé 1,4 millions d’entrées). Ce film lui ouvre la voie à d’autres productions originales : Princes et PrincessesAzur et AsmarLes Contes de la NuitKirikou et les Bêtes SauvagesKirikou et les Hommes et les Femmes... Dans un style très différent, Sylvain Chomet, venu de la bande dessinée et du court métrage, réaliste LesTriplettes de Belleville en 2003. Ce succès lui permet en 2010 d’adapter un scénario de Jacques Tati pour le cinéma : L’Illusionniste.

Des studios émergents se fraient un chemin vers le cinéma depuis les effets spéciaux numériques : c’est le cas par exemple de Buf Company et de MacGuff.
Le premier, créé en 1984, est une des principales sociétés d’effets spéciaux en France, et travaille sur des films français (Les VisiteursLa Cité des Enfants Perdus...) et américains (Fight ClubMatrixHarry Potter...), avant de produire pour EuropaCorp les effets spéciaux de la sérieArthur.
Le second est initialement (et principalement) tourné vers le cinéma (DobermannVidocqLe PetitPoucetBlueberry...), et réaliste Chasseurs de Dragons en 2008, avant d’être approché par Universal qui rachète le département animation en 2009 (devenu Illumination MacGuff). Ce nouveau studio, à cheval entre Hollywood et la France, réalise plusieurs films en 3 dimensions : Moi, Moche et MéchantI et II, et Le Lorax. Sans doute faut-il voir dans le destin croisé de ces deux studios une différence majeure qui explique la difficulté du cinéma d’animation français à franchir un palier : la distribution internationale (et donc américaine) permise par Universal n’est pas la même que celle à laquelle peut prétendre EuropaCorp...

Enfin, d’autres nouveaux acteurs apparaissent en marge du système, depuis le riche écosystème français du jeu vidéo. Ankama Animation décline ainsi en série télévisées les licences du studio roubaisien Ankama (DofusWakfu), et prévoit des longs métrages. Ubisoft pénètre aussi le marché avec une série tirée de sa licence les Lapins Crétins. On imagine que la dynamique ne s’arrêtera pas là.

Un succès porté par un environnement performant

Plusieurs leviers permettent à l’animation française de poursuivre sa trajectoire ascensionnelle : un ensemble d’écoles performantes, reconnues mondialement pour leur qualité, et qui attirent de plus en plus d’étudiants (les Gobelins, Supinfocom, La Poudrière, George Méliès...) ; un mécanisme de financement mis en place par le CNC (crédit d’impôt ouvert aux films d’animation) ; un Festival international du Film d’Animation à Annecy, créé en 1960 et dont la direction artistique est assurée par Serge Bromberg ; et enfin des politiques locales en faveur des filières d’excellence, comme à Angoulême bien sûr, ou encore à Bourg-les-Valence (Drôme), où les studios Folimage (La Prophétie des GrenouillesMia et le MigouUne Vie de Chat) occupent l’espace de la Cartoucherie, friche industrielle également occupée par l’école La Poudrière.

Source: http://www.inaglobal.fr/cinema/article/ou-en-est-lanimation-francaise

La représentation des femmes dans l’animation japonaise

Malgré la vague d’émancipation des années 70, les femmes sont encore très soumises au poids de la tradition et de la vie familiale. La société japonaise est encore très inégalitaire à ce niveau, beaucoup plus qu’en France par exemple.  On dit souvent que le cinéma est un miroir de la société, mais cela est à nuancer dans le cas japonais. Les héroïnes de films d’animation japonais sont plus nombreuses à l’écran que dans les autres pays producteurs d’animation, mais cela ne veut pas nécessairement dire que les femmes ont aujourd’hui un rôle prépondérant dans la société japonaise. En effet, le nombre d’héroïnes en tant que personnage principal d’un film est similaire au nombre de héros, contrairement au cinéma occidental où on compte en moyenne une héroïne pour trois héros. Le cinéma d’animation japonais respecte globalement la parité entre les hommes et les femmes. Il semble être plus égalitaire que les cinémas d’animation occidentaux. On peut alors se demander à quoi est due cette différence. Une explication possible de cette présence féminine dans l’animation japonaise est peut-être à chercher du côté de la tradition des « shōjos » mangas, une littérature spécifiquement adressée aux filles, dont sont issus beaucoup d’animés.

La culture « shōjo » : une animation par et pour les filles

Histoire des shōjos
La source de la création des animations japonaises sont les mangas, une littérature japonaise très spécifique qui connaît un vif succès aujourd’hui en Occident. Les mangas font partie intégrante de la culture japonaise, ils sont un reflet de leur histoire et de leur culture, et sont présents dans la vie quotidienne. Ils traitent de sujets très divers allant de la politique, de la religion, de la famille, jusqu’au genre ou à l’économie, et ils s’adressent tout aussi bien aux enfants qu’aux adultes. Il existe des sous-divisions au sein des mangas, dont les « shōjos » mangas, une littérature s’adressant spécifiquement aux filles.
Les shōjos mangas ont longtemps été considérés comme des mangas de seconde main. Même si beaucoup d’hommes étaient impliqués dans leur production en tant que créateurs et éditeurs, les femmes ont rapidement pris de plus en plus d’importance, surtout à partir des années 60. Les femmes ont créé une nouvelle génération d’artistes[4], qui expriment leurs émotions personnelles pour les lectrices, avides d’entrer dans ce monde créé par,  pour, et à propos des filles. Les shōjos mangas se sont inspirés des magazines féminins d’avant-guerre, qui étaient un moyen pour les femmes d’avoir une petite bulle privée, éloignée des pressions de la société patriarcale et des mariages arrangés. La représentation des femmes dans cette littérature a inspiré de nombreux animés : leurs corps sont pâles et frêles, ils représentent le corps bourgeois d’une fille qui ne travaille jamais, une fille isolée et protégée qui ne participe pas à la vie publique. Les jeunes filles sont souvent très similaires et vêtues de la même façon, dans un uniforme de collégienne par exemple, ce que MacWilliams a appelé « l’esthétique de la similitude »[5]. Les filles ont des grands yeux en amandes et des mines sucrées, et leur voix est aiguë et fluette. Elles représentent le stéréotype parfait de la fille innocente et fragile. Elles évoluent dans un univers très « féminin » aux couleurs vives et aux lignes rondes et douces et elles sont souvent associées à la magie. L’univers shōjo développe une esthétique kawaii signifiant « mignon » en japonais,  associé au domaine de l’enfance et de la féminité.
Il faut mettre la culture shōjo en perspective par rapport à la culture « shonen » destinée spécifiquement aux garçons pour bien en comprendre les différences. Les shonens sont des mangas et des animés destinés aux garçons entre 10 et 15 ans. Les héros, masculins, sont immédiatement plongés au cœur de l’action, dans des combats où ils exhibent leur courage et leur persévérance. Les décors sont souvent des univers de science-fiction, remplis de machines, de méchants avec des super-pouvoirs, et de cyborgs hérissés d’armes redoutables. Les héros montrent leur combativité et il y a toujours une certaine forme de violence tout au long de la série, aussi bien visuelle que sonore. On peut penser à Dragon Ball Z où les lignes dessinées sont souvent anguleuses et pointues (les cheveux de San Goku, le héros principal deDragon Ball Z en sont représentatifs). Il y a souvent des cris, et des bruitages d’explosions. Les dialogues et la trame principale de l’histoire se focalisent sur les combats et sur les prouesses que doit accomplir le héros plus que sur ses émotions ou ses pensées. Au contraire, dans lesshōjos, l’intrigue se base sur les relations humaines, tout autant amicales qu’amoureuses. L’émotion et les sentiments de l’héroïne occupent une grande place dans l’histoire. Une importance particulière est accordée aux réflexions personnelles de l’héroïne et à son ressenti, ce qui se traduit graphiquement par des yeux démesurément grands, afin d’exprimer une vaste palette d’émotions. Ses yeux seront remplis d’étoiles lorsqu’elle est heureuse, ou ils vacilleront lorsqu’elle est sur le point de pleurer : ils sont littéralement la fenêtre de l’âme. Le but du shōjoest de montrer la complexité de la psychologie interne du personnage, et de révéler le monologue intérieur, les pensées les plus profondes de l’héroïne au spectateur. L’intention est de créer une certaine atmosphère plus que de passer d’un moment d’action à un autre.
anime6« Shōjo » VS « shonen »
Relations amoureuses et homosexualité dans les shojos
Les relations entre hommes et femmes restent très soumises aux idées conservatrices et ne laissent que peu de place à la complexité ou l’originalité de l’histoire. Lors d’une histoire d’amour, l’héroïne va inévitablement tomber dans le « piège de l’amour ». Elle perd toute autonomie sociale ou sexuelle et devient particulièrement passive ; tout ce qu’elle fait c’est pour l’homme, par amour pour lui ; elle se sacrifie à lui, et le remercie de l’aimer malgré tous ses défauts.
A l’inverse, les relations « doseiai » entre deux personnes de même sexe, permettent une histoire plus complexe et aboutie. La similarité des personnages leur permet d’entrer dans une relation romantique sur un pied d’égalité, et les filles peuvent exprimer sainement leurs désirs, car leur pureté physique et leur innocence n’est alors pas menacée.
Les relations doseisai sont particulièrement répandues dans les mangas, mais il ne faut pas les confondre avec la vision occidentale du XXe siècle de l’homosexualité. Ces filles ne sont pas considérées comme lesbiennes. Les relations doseiai étaient considérées comme une étape normale du développement des jeunes filles, et comme un moyen de retarder les expériences hétérosexuelles jusqu’à ce qu’elles soient assez âgées pour le mariage.
En revanche, les filles doivent toutes conserver une apparence similaire, et « girly ». Susan J. Napier résume la culture shōjo en expliquant que « ce terme est devenu un raccourci pour désigner une sorte d’identité liminale entre enfant et adulte, caractérisée par un érotisme supposément innocent basé sur l’immaturité sexuelle, une culture de la consommation qui se procure des biens ‘mignons’ (kawaii), et le fait de privilégier de façon mélancolique un passé récent ou une forme flottante de nostalgie« .[6]
Une division genrée très rigide
Sur le modèle des mangas shonen pour les garçons, et des mangas shōjos pour les filles, l’animation japonaise a ainsi instauré une division très nette entre les animés destinés d’une part aux garçons, d’autre part aux filles. La division genrée des représentations proposées aux enfants s’effectue d’une manière totalement différente dans les dessins animés américains et européens et les animés japonais. En effet, alors que (en ce qui concerne les Disney par exemple) les différences dans les représentations proposées aux enfants de ce que sont censé-e-s être les « hommes » et les « femmes » sont construites à l’intérieur même des « films pour enfants », les japonais ont quant à eux créé deux genres totalement différents, tant au niveau de l’intrigue que des codes graphiques. Cela ne signifie évidemment pas que le sexisme latent d’un grand nombre de productions culturelles « occidentales » soit anodin, mais l’on peut faire remarquer que la division sexiste des rôles et des représentations s’effectue d’une manière beaucoup plus tranchée, explicite et figée dans les productions culturelles japonaises.
On peut s’inquiéter des conséquences de cette division sur les enfants : que se passe-t-il pour un petit garçon qui se rend compte qu’il préfère regarder des shōjos ? Par ailleurs, une production culturelle aussi rigide ne peut qu’accentuer les stéréotypes de genre dans la société. En délimitant ce qui est pour les « filles » de ce qui est destiné aux « garçons », les productions culturelles enferment les gens dans des représentations rigides, et excluent toute personne contrevenant à ces codes.
Cette division entre shonens et shōjos se retrouve plus dans les séries TV japonaises que dans les longs métrages cinématographiques. Néanmoins, l’existence d’un genre à part entière destiné à un public féminin laisse à penser qu’il y a eu des influences jusqu’à aujourd’hui. Le genre shōjo a longtemps été dénigré et considéré comme une production de très faible intérêt et qualité. Mais il a contribué à favoriser la présence des femmes dans l’animation, à travers un genre dédié à elles.

Des femmes hyper sexualisées

Difficile de parler des femmes dans l’animation japonaise sans évoquer l’érotisation accrue des corps féminins à l’écran. C’est une caractéristique spécifique au cinéma japonais car les femmes sont rarement érotisées dans les films d’animation occidentaux.
L’apparence vestimentaire des filles dans les shōjos mangas témoigne d’une érotisation de leur corps. D’après le petit Larousse Illustré, l’érotisation est une « utilisation de certaines parties du corps, d’activités mentales ou de comportements apparemment indépendants de la sexualité comme source d’excitation et de jouissance ». Ces filles portent des mini-jupes ou des mini-shorts laissant apparaître leurs longues jambes fines. Même lorsque leurs jambes sont recouvertes de bottes ou de bas montant, elles arborent une jupette d’écolière qui se révèle courte, à un point presque indécent. Elles exhibent toujours une certaine nudité, qui n’est pas nécessaire à la trame de l’histoire, et qui contraste avec l’innocence de leurs aventures amoureuses. Nous pouvons dire qu’elles sont érotisées car leur apparence physique arbore une certaine nudité qui n’a aucun lien avec la trame narrative. Elles montrent parfois leur nombril, comme dans le manga comique School rumble, ce qui est inimaginable pour l’animation française ou américaine (à l’exception de quelques figures telles que la Petite Sirène ou Jasmine par exemple).
anime7Sailor Moon (1992-1993)
 Cette érotisation est parfois liée à l’image de la jeunesse et des fillettes. Frédéric Clément a appelé ce mélange le « complexe de Lolita »[7], ce qui se traduit en raccourci par le mot « lolicon ». (On peut parler d’une œuvre lolicon, ou de quelqu’un qui est lolicon). Le corps des fillettes bascule du domaine du mignon au domaine du désirable où l’innocence et la sexualité se côtoient. Le Japon est l’un des pays les plus laxistes en ce qui concerne la représentation sexuelle des mineurs ; l’article 175 des lois sur l’obscénité interdit de représentation des poils pubiens, mais pour tout le reste, le champ semble malheureusement assez libre.
En animation traditionnelle, (dans les films américains par exemple) les parties les plus mouvantes du corps comme la bouche et les yeux sont dessinées sur des couches de celluloïd transparentes séparées de celles servant de support au corps « fixe ». Une telle méthode d’animation permet aux animateurs d’éviter de redessiner le corps en entier à chaque prise d’image, réduisant ainsi les coûts de production. Dans l’animation japonaise, une couche de celluloïd est parfois rajoutée pour la poitrine des femmes, souvent proéminente, qui fait alors partie des « parties mouvantes » du corps. Cela contribue à « morceler » au sens propre et figuré, le corps de la femme. Dans « Visual Pleasure and Narrative Cinema » un des textes fondateurs des théories féministes sur le cinéma publié en 1975, Laura Mulvey dénonce le morcellement du corps des femmes. D’après elle « le cinéma classique favorise le morcellement des corps par la prise de vue qui « découpe » les corps –celui des femmes davantage que celui des hommes– afin de fétichiser et d’érotiser les parties de leur anatomie (seins, fesses, jambes) »[8]. L’animation japonaise reproduit ce morcellement dans le procédé de création des animés, avec les celluloïds, ainsi que dans le film lui-même avec des plans de caméra qui fétichise encore plus les corps, avec l’utilisation de la contre-plongée par exemple.
Cette érotisation des femmes dans l’animation japonaise trouve son paroxysme dans les « hentai », les mangas pornographiques. L’érotisation est alors devenue sexualisation.
En conclusion, on s’aperçoit que les héroïnes sont plus nombreuses dans le cinéma d’animation japonais que dans les cinémas d’animation occidentaux. Cela est dû à la cultureshojo qui a développé une littérature propre aux filles. Cette littérature ensuite adaptée en animation explique le nombre élevé d’héroïnes dans les séries animés aussi bien que dans les films d’animation. Cette parité numérique est en revanche mise en défaut par la faible qualité de représentation des femmes. Elles sont érotisées à l’excès, soumises à de nombreux stéréotypes et au regard de l’homme. Même si de nouveaux auteurs talentueux comme Miyazaki, connu pour son côté « féministe », proposent une nouvelle vision des femmes, modernes et émancipées, cela reste une exception dans le paysage de l’animation japonaise. Les femmes restent en grande majorité mal-représentées, stéréotypées, et hyper-sexualisées.
Bibliographie:
1. Le groupe des « 24 nen gumi » est un groupe de femmes qui a contribué à faire du shōjo manga un genre à part entière. Avant elles, les shōjos mangas étaient considérés comme la forme la plus basse des mangas.
2. « Aesthetic of sameness », Japanese Visual Culture, chap 6
3. Traduction de Frédéric Clément, Machines Désirées, La représentation du féminin dans les films d’animation Ghost in the Shell de Mamoru Oshii, p 91.
4. Frédéric Clément, Machines désirées, p 91
5.Ibid., p 83 (une traduction partielle en français de cet article a été publiée dans le n°67 de la revue CinémAction intitulé « 20 ans de théories féministes sur le cinéma »)

Différences entre Animation Japonaise & Occidentale

En tant que spectateurs, on voit bien qu’il y a une différence entre l’animation Japonaise et Occidentale, parce que c’est visuellement différent — et pas seulement parce qu’on a jamais vu mickey défoncer du mecha. Une différence culturelle en fait.
D’accord, mais comment expliquer plus préciser ça ? Qu’est-ce que ça veut dire ? Il y a quelques années, l’animateur Peter Chung (Aeon Flux) avait pris le temps de partager un commentaire intéressant sur ce sujet, donnant des détails sur la différence culturelle et l’impact au niveau du processus technique même, dans la manière de concevoir l’animation. En voici une traduction;

DIFFÉRENCES CULTURELLES

D’après Chung, culturellement le classicisme occidental repose sur une notion de réalisme, où de fait, l’artiste (et la technique) s’efface au profit du sujet. Un peintre classique accorde de l’importance à créer l’illusion, ainsi un tableau doit réussir à faire oublier au spectateur qu’il regarde à de l’huile sur une toile, à révéler le sujet comme s’il s’agissait d’une fenêtre sur la réalité. Les coups de pinceaux doivent se fondre dans le tableau de manière à ne laisser aucune trace évidente du travail de l’artiste.
Alors que du côté Japonais, que ce soit la peinture ou le théâtre, ces arts correspondraient plus à la notion de “modernisme” en Occident. Ce sont des tableaux stylisés, impressionnistes (et expressionnistes), voués entièrement à montrer les coups de pinceaux et la nature plate et graphique de la surface de l’image. De la même manière, le kabuki, noh, bunraku sont stylisés, cherchant à capter l’essence d’un personnage plutôt que sa vraisemblance émotionnelle. Une approche de la représentation qui a été importé dans l’animation.
Bunraku en action
Bunraku en action
On peut envisager l’animation Japonaise comme une extension du Bunraku, adaptée aux moyens techniques actuelles. Tout comme dans le Bunraku, il n’y a pas la volonté de créer une parfaite illusion de la réalité. Les mains des manipulateurs des marionnettes sont visibles. De même que la patte de l’animateur dans l’animation Japonaise n’est pas seulement visible, elle est souvent remarqué [voir tout ce qui concerne le domaine du sakuga].
L’une des raisons pour laquelle les jeunes artistes sont attirés par l’animation Japonaise, en essayant de s’en inspiré, c’est qu’on peut voir comment c’est fait. On peut facilement décomposer chaque dessin, et pour cette raison même, ça semble être à la portée de tous.
Dans l’animation classique (qui fait référence à Disney), permettre au spectateur de remarquer qu’il regarde des dessins est un pêché suprême. Dans l’animation classique, même les postures fixes sont redessinées à chaque fois pour les faire “respirer.” Ça s’appelle “moving holds” [maintenir une image]. Dans l’animation classique Américaine, la main de l’animateur ne doit pas être visible. Tout est fait pour se concentrer sur le personnage, et dans l’illusion qu’il s’agit d’une créature vivante. C’est la PRINCIPALE différence entre l’animation Japonaise et Disney.
Ici, les deux personnages en arrière plan maintiennent une pose, ils sont immobiles. Maintenir une image est courant dans le cadre d'une animation limitée -- 12 images animées sur les 24 par ex.
Ici, les deux personnages en arrière plan maintiennent une pose, ils sont immobiles. Maintenir une image est courant dans le cadre d’une animation limitée — 12 images animées sur les 24 par ex.

LE PROCESSUS TECHNIQUE

lipsync-exemple1. Des boucles plutôt que des dialogues pré-enregistrés. La majorité des spectateurs le remarque de suite. Ce qui est moins évident par contre, c’est comment ça affecte l’approche du réalisateur dans la mise en place des scènes de dialogue. Un réalisateur américain se concentrera sur le jeu du personnage pendant qu’il parle, excluant certains détails dans la scène comme l’environnement, la lumière, les angles de caméra… Un réalisateur Japonais tend à faire l’opposé.
Dans les deux cas, il y a du bon et du moins bon. Ainsi au Japon, l’animation type d’un personnage est la conséquence du besoin de camoufler l’imprécision de la synchronisation labiale [le mouvement de la bouche par rapport au doublage]. Le résultat, c’est ces petites bouches et mentons effilés des personnages “kawaii”, ce qui permet aux animateurs de minimiser les postures des bouches, d’éviter d’avoir à animer la mâchoire. Le Japonais comprend moins de phonèmes que les langues occidentales, ce qui permet d’être moins précis dans la synchronisation labiale sans perturber l’audience.
Storyboard par Satoshi Kon, voir ce making-of
Storyboard par Satoshi Kon, voir ce making-of
2. Le rôle du réalisateur. Dans les cas les plus connus (Miyazaki, Rin Taro, Kawajiri, Kon, Oshii), le réalisateur dessine entièrement le storyboard. Habituellement le réalisateur tient le rôle de kantoku [réalisateur en japonais] mais selon les cas, il peut être un vérificateur des scènes un peu plus prestigieux (ce qui s’appelle “enshutsu”). Pendant longtemps, beaucoup de réalisateurs ont débuté non pas en tant qu’animateurs, designers ou storyboarders, mais en tant que vérificateurs (satsudashi). Un poste qui a perdu de son importance avec le passage au numérique.
3. L’organisation d’un studio. Ça se divise entre genga et douga (Genga se traduit par “image clée” tandis que Douga “image intermédiaire”). En dehors du Sakkan (Sakuga Kantoku, directeur de l’animation), c’est tout. Parfois, le rôle du sakkan est tellement important qu’il peut même être payé plus que le réalisateur. C’est un poste qui n’existe pas dans un studio Américain, dont la structure typique comprend tellement de postes qu’il est parfois difficile d’y voir clair.
En tout cas, la plus importante différence, c’est que les animateurs Japonais sont assignés à des séquences. Ils animent chaque élément d’une séquence assignée. Parfois, ça comprend les personnages, les objets, les véhicules, les machines, animaux, les effets, les ombres, les fonds (s’ils bougent). Alors que dans les cas Américain, les animateurs travaillent sur un personnage en particulier, et doivent travailler entre eux lorsque les personnages jouent dans une même scène. Chaque animateur travaille sur sa spécialité.
Postes de travail — animateur US (gauche) / animateur JAP (droite)
Postes de travail — animateur US (gauche) / animateur JAP (droite)
4. Le travail brut. Les animateurs américains accrochent leurs dessins sur une bar attaché à un disque rotatif, qui est habituellement posée sur un bureau incliné. Ce qui leur permet d’utiliser leur main libre pour faire “tourner” leurs dessins à mesure qu’ils travaillent, afin de vérifier la fluidité de l’animation. Les animateurs Japonais posent leurs dessins sur une bar non-fixée et posée sur une surface quasi-horizontale. Ils vérifient seulement occasionnellement l’animation de la scène, vu qu’ils doivent soulever un tas de feuilles de la bar. Le travail de l’animateur Japonais est plus mental (ou intellectuel), visualisant le résultat dans sa tête. Alors qu’un animateur Américain travaille plus par feeling, par instant, vérifiant encore et toujours la fluidité de son travail à mesure qu’il dessine.
5. Les feuilles d’exposition. Un point un peu obscur mais à l’influence tenace. Les animateurs Japonais classent leurs dessin selon le niveau d’appartenance. La feuille A est au fond, la B, au milieu, et ainsi de suite. Les animateurs Américains classent leurs dessins selon le contenu. Le dessin d’un chat par exemple sera classé C, et quelque soit son niveau d’apparition à l’image, ça ne change pas sa désignation. Ce personnage sera toujours C.
Les animateurs Japonais classent leurs images clées dans l’ordre de la séquence sans tenir compte du nombre de dessins (intermédiaires) au final nécessaires pour compléter la scène. C’est au dessinateur intermédiaires de faire le compte des images. Apparemment, c’est un système pensé pour faciliter le calcul des images, de manière à éliminer la possibilité d’un trou ou d’un surplus d’images.
6. Calcul du salaire. Pour faire simple, les animateurs clés sont payés à la scène. Les animateurs intermédiaires sont payés à la feuille. Ainsi, passer plus de temps sur un dessin n’avantage en rien un intermédiaire, ce qui explique la tendance à produire moins de dessins détaillés et donc de préférer produire un maximum de dessins simples.
Beaucoup de remarques intéressantes de la part de Peter Chung qui rappelle la réalité économique de l’industrie de l’animation japonaise et ses choix – l’animation limitée, l’organisation d’un studio, l’apparente sobriété et aussi tout ce qui concerne le domaine du sakuga, d’ailleurs pour aller plus loin sur le sujet, un immanquable à découvrir d’urgence.

Petite histoire de l’animation japonaise

Quelques repères chronologiques


Le but de cet article est de présenter les grandes lignes de l’animation japonaise, en essayant de dégager au passage quelques-unes de ses spécificités par rapport au cinéma d’animation américain ou français.

Étant donné l’ampleur du sujet, cet article n’a évidemment pas la prétention d’être exhaustif, ni d’analyser dans le détail chacune des productions dont il sera question. Son ambition est juste de donner quelques points de repère sur le sujet pour celles et ceux qui ne sont pas familiers de ce cinéma. 



L’animation japonaise se désigne par un nom spécifique : les « animés ». C’est le mot utilisé par les japonais pour qualifier tous les dessins d’animation indépendamment de leur nation d’origine ; à l’inverse, en dehors du Japon, « animés » désigne les productions spécifiquement japonaises.
La production japonaise d’animation débute en 1917 avec les films de Seitaro Kitayama, un des pionniers du cinéma d’animation. Pendant la guerre, l’industrie se développe, mais la production reste majoritairement du dessin animé de propagande anti-américaine. Après 1945, le Japon devient le deuxième producteur mondial d’animation derrière les États-Unis, place qu’il occupe toujours aujourd’hui. Les dessins d’animation japonais sont dès lors fortement influencés par les animations américaines. Au milieu des années 50, la Toei Doga (ou Toei Animation) voit le jour. C’est le studio d’animation le plus important au Japon, encore aujourd’hui. Beaucoup de personnes le surnomment le « Disney Asiatique », même si la Toei n’apprécie pas ce titre. Taiji Yabushita est un des réalisateurs connus de l’histoire de l’animation japonaise ; il a réalisé Le Serpent Blanc en 1958, le premier long-métrage de la Toei, qui fut un grand succès. Il y a également Osamu Tezuka, qui devient une légende du « manga[1] » à travers les séries télévisées (TV). Il développe une animation destinée à la télévision et il est célèbre pour les séries Astro Boy et Le Roi Léo (dont Disney s’inspirera pour créer le Roi Lion !). Il faut distinguer deux branches de l’animation japonaise, qui se scinde en deux dès les années 50, avec d’une part des récits destinés à l’international très européanisés, et d’autre part une production locale destinée à la télévision, sous la forme de séries de faible qualité.
La mauvaise réputation des séries d’animation japonaises
Les séries japonaises ont contribué à la mauvaise réputation de l’animation japonaise dans le monde. Par souci d’économie, l’animation descend à quatre dessins par seconde au lieu de douze ou vingt-quatre. L’objectif est de produire vite et en grande quantité : l’animation devient une industrie, mais cela crée des dessins animés de très faible qualité. Le génie des japonais est d’avoir trouvé un moyen de faire de l’animation en évitant la coûteuse fluidité disneyenne. Ils inventent un nouveau style graphique pour les émotions, qui se base sur la fixité des images et leur répétition. Par exemple, le personnage frappé de terreur aura la typique goutte de sueur en suspens et une bouche immense qui restera longtemps béante. Les personnages restent pétrifiés de peur ou de joie, et les dessins intermédiaires peuvent alors être supprimés. Le temps ralentit pour nous permettre de suivre les commentaires de la pensée. Une même image fixe peut rester plusieurs secondes à l’écran, sur laquelle on va par exemple entendre la voix du personnage en train de réfléchir, ou qui peut aussi représenter l’extrême concentration du héros se préparant à affronter ses ennemis lors d’un match par exemple.
L’animation japonaise renonce ainsi à la fluidité du mouvement et opte pour un style plus statique qui permet de grandes économies lors de la production.  Dès lors, l’expression « dessin animé japonais » se met alors à sonner de façon péjorative, synonyme d’industrie lourde et de dessin bâclé.
Le renouveau des années 80 : des chefs d’œuvre d’animation
Il faudra attendre le début des années 80 pour qu’une animation de qualité se développe dans le cinéma japonais. Une nouvelle génération d’auteurs apparaît et relance le cinéma d’animation, qui avait été éclipsé par les séries TV. Un des prestigieux chefs de file de cette nouvelle génération est Hayao Miyazaki. Il se fait engager à la Toei Animation, mais fonde très vite son propre studio. Il acquiert ainsi une indépendance totale en 1985 avec la création de son propre studio, le studio Ghibli. Devenu célèbre pour la richesse visuelle de ses films ainsi que leur densité thématique, c’est un dessinateur hors-pair mais aussi un véritable « metteur en scène » qui organise l’espace scénique comme s’il y avait de vrais acteurs avec une vraie caméra. Le temps semble suivre naturellement, la mise en scène introduit du concret, de l’anecdotique, une dimension quotidienne. Il développe un goût pour les récits d’aventures situés dans un passé de légende ou un futur post-apocalyptique, et quelques-uns de ses thèmes favoris sont le rapport entre nature et technologie, ou encore la guerre et le pouvoir. Miyazaki crée des ambiances où règnent l’irréalité, les histoires fantastiques, et l’insolite. Pour Stéphane Le Roux, « l’essence de son art n’est pas le foisonnement imaginaire de ses récits, tout jubilatoire qu’il soit, mais justement la rencontre inattendue de cet imaginaire avec le réalisme filmique forgé au côté de Takahata. S’y révèlent une poésie singulière, insolite, l’expression d’un certain « naturel dans le merveilleux » »[2]. Miyazaki développe une véritable « poésie de l’insolite ». Il a par ailleurs une grande connaissance de la littérature enfantine, d’où découlent ses films adressés aussi bien aux enfants qu’aux adultes.
anime1anime2Mon voisin Totoro (1988), de Hayao Miyazaki
Les films produits par cette nouvelle génération de réalisateurs sont de très belle qualité, et obtiennent une reconnaissance internationale. Parmi eux, il faut citer Isao Takahata avec Le tombeau des lucioles, Katsuhiro Otomo avec Akira, Mamoru Oshii avec Ghost in the Shell, ou encore Satoshi Kon avec Perfect Blue (qui mettent tous en scène une héroïne à l’exception d’Akira !).

 Les spécificités du cinéma d’animation japonais

Une animation pour adultes issue de la tradition shintoïste
Une des caractéristiques du cinéma d’animation japonais est d’avoir utilisé l’animation presque immédiatement pour les adultes. En Occident, l’animation a longtemps été considérée comme un cinéma présentant peu d’intérêt ; et lorsque les grandes industries comme Walt Disney se sont développées, elles s’adressaient en priorité aux enfants. Les japonais n’ont pas la même approche, l’animation est considérée comme un genre cinématographique à part entière qui s’adresse à l’ensemble de la population. Ainsi si certaines productions peuvent s’adresser aux enfants, une grande majorité des animés reste destinée aux adultes.  Cela s’explique par l’animisme[3] issu de la tradition shinto, qui imprègne la société japonaise. D’après la conception animiste, nous sommes dans un monde où les animaux, les humains, les esprits et les objets cohabitent. Ce qui est vu comme « imaginaire » ou « enfantin » en Occident fait partie de la normalité et du quotidien dans la tradition japonaise : les rêves surnaturels, les monstres, la déformation du réel. Les adultes seront tout aussi émus que les enfants en voyant des esprits et des monstres dans un film d’animation. Pour eux, ce ne sont pas des apparitions fantaisistes et irrationnelles, mais bien des événements qui sont de l’ordre du possible. En Occident, les esprits  de la forêt ou les actes de magie font partie intégrante du monde du dessin animé et ne font pas écho à la vie réelle. C’est tout le contraire pour les japonais, pour qui de tels évènements semblent plausibles, et qui peuvent ainsi apprécier les animés, en partageant l’émerveillement de leurs enfants devant des apparitions imaginaires.
Un cinéma destiné à l’exportation
Dès les années 50 les graphismes s’occidentalisent afin d’atteindre une audience plus large au niveau mondial. Les personnages acquièrent des traits européens pour que les films d’animation s’exportent plus facilement.  Par ailleurs, les histoires se sont calquées sur l’imaginaire européen. Au lieu d’américaniser les mythologies européennes, comme l’a fait Disney, les japonais se sont adaptés à leur public potentiel. Ils ont vendu des films japonais, basés sur des histoires européennes, comme Jack et le Haricot Magique, les contes d’Andersen, ou encore Le merveilleux voyage de Nils Holgersson de Selma Lagerlöf.
anime3Nils Holgersson (1980), série animée fidèlement inspirée du roman Le Merveilleux Voyage de Nils Holgersson à travers la Suède de Selma Lagerlöf
anime4Princesse Sarah (1985), série inspirée du roman d’après le roman La Petite Princesse de Frances Hodgson Burnett
Là où les américains transforment les contes en y intégrant la morale américaine et le « happy ending », les japonais choisissent de conserver l’histoire originale. Une touche japonaise s’instaure à travers les graphismes. C’est le cas de Takahata qui a créé la série Heidi dans les années 70. Les graphismes sont clairement de l’animation japonaise, mais l’histoire originale provient d’une romancière Suisse.
anime5Heidi (1974), par Isao Takahata
Un cinéma d’« auteur »

Les réalisateurs ont un rôle très important au Japon. Ils sont considérés comme de véritables artistes, et ils jouissent d’une très forte notoriété. Leur situation est diamétralement opposée à celle des réalisateurs d’Hollywood, où ils sont souvent éclipsés devant les maisons de production. Par exemple, en parlant de La Princesse et la Grenouille, beaucoup de personnes répondront que le film a été produit par « Disney ». Mais peu de personnes pourront dire que les réalisateurs sont John Musker et Ron Clements. Au contraire, le cinéma d’animation japonais est un cinéma d’auteur. Certains animateurs sont même considérés comme des « Maîtres » : c’est le cas de Miyazaki, Tezuka, ou Otomo. Chacune de leurs œuvres est indissociablement liée à leur nom d’artiste. Face à la déferlante du numérique, et les nouveaux films en 3D, les japonais gardent une esthétique assez stable, en 2D. L’idée de film en tant qu’œuvre artistique peut expliquer le fait que les réalisateurs restent concentrés sur la 2D, il faut qu’il reste un travail assez « artisanal » découlant directement des prouesses du « Maître ».